J'ai parfois une impression de déjà vu !
Assuétude et dépendance. L'anglais addiction a pour étymologie latine, ad-dicere « dire à » !
Chez les romains, les esclaves n'avaient pas de nom propre, ils étaient dits
à leur Pater familias.
Ils portaient le nom du maître du domus. De leur maître-étalon, le Père
de famille. Comble du mariage gay ?! Le terme d'addiction exprime une
absence d'indépendance et de liberté, c’est donc bien d’un esclavage, d’une
dépendance qu’il s’agit. Pour ce qui me concerne ici, d'une dépendance au tabac. La moins pire de mes deux dépendances,
l’autre étant l’asservissement à l’alcool que j’ai cessé de consommer depuis
quelques années.
Hier, je ne me souvenais plus comment ça avait commencé. Dans ma mémoire, c'était un voisin de palier qui m'en avait offert une. Mais non, avec le voisin, j'ai juste discuté. En fait tout a commencé par une taffe aspirée d'une cigarette sortie d'un stock de vieux paquets de tabac que je conservais pour le souvenir... Le tabac, c'est comme les fusils, on l'achète par cartouches, on croit que c'est inoffensif, on tire dessus et vlan, le coup part, on se remet à fumer...
Hier, je ne me souvenais plus comment ça avait commencé. Dans ma mémoire, c'était un voisin de palier qui m'en avait offert une. Mais non, avec le voisin, j'ai juste discuté. En fait tout a commencé par une taffe aspirée d'une cigarette sortie d'un stock de vieux paquets de tabac que je conservais pour le souvenir... Le tabac, c'est comme les fusils, on l'achète par cartouches, on croit que c'est inoffensif, on tire dessus et vlan, le coup part, on se remet à fumer...
Du gris, du scaferlatti, des gauldos à 3,12 nouveaux francs le paquet...
Il va sans dire que, depuis, cette collection est passée par la fenêtre !
Que s’est-il passé ? Depuis plusieurs jours j’ai envie de fumer. Je
me suis retenu sans grande difficulté durant quelques jours, mais hier, ou plutôt
avant-hier, j’ai fumé une cigarette. Je sais pertinemment que c’est exactement
la chose à ne pas faire dans ma situation de dépendance au tabac. Je sais que le
lendemain ou le surlendemain j’irai chercher un paquet de clopes et que je fumerai à nouveau automatiquement les mêmes quantités qu’autrefois. C’est mécanique, c’est
inscrit dans mon corps et dans ma tête. Ce n’est pas forcément génétique mais c’est
assurément acquis !
J’ai
des difficultés avec ce corps sans lequel je n’existerai pas ! Ce besoin de le remplir, avec du
vin, avec de la fumée ou avec de la bonne bouffe et du café. C’est
dingo, dur à manœuvrer un corps qui n’est pas corpusculaire ! Surtout lorsque l'hygiène de vie n'est pas la première de mes préoccupations !
Remplir un vide. C’est archaïque comme l’enfance, un besoin primitif
comme l’enfant a besoin de sa mère. Freud disait que ce besoin mal résolu, ce
besoin primordial qui aurait mal évolué entraîne les addictions. Savoir cela ne
permet pas pour autant d’y faire face. Freud
ne dit pas comment faire pour se débarrasser de ces travers-là, mais il dit comment en prendre
conscience. L'enfant c’est une personne qui n'a pas encore acquis le langage, le mot enfant,
là encore, est issu de la francisation du latin infans, infantis, désignant
le très jeune enfant qui ne parle pas. Donc le seul remède à l’assuétude au
tabac, c’est la parole.
La
parole pour sortir de l’enfance, mal vécue, mal cuvée. C’est aussi grâce à la
parole que je peux continuer à ne plus boire d’alcool.
Ce soir j’ai songé, je vais préparer des photos pour une exposition et
puis je me suis dit, il fait froid, ce n’est pas du tout folichon de faire de l’encadrement,
je me fumerais bien une cigarette avant de travailler ! Au conditionnel la
cigarette, bien sûr, - si j’avais un paquet de clopes ! C’est amusant,
dans ma tête, il m’est revenu toute l’illusion du plaisir et aussi toute
la facilité démoniaque de fumer. Dans les plateaux de la balance, le tabac
pesait soudain bien plus lourd que ce travail fastidieux d’encadreur qui m’emmerde
profondément. Parce qu’en plus il faut que ça soit propre et minutieux, le
cadre ! Et je me suis raisonné, non, c’est trop facile. Puis j’ai pensé, c’est
incroyable la facilité avec laquelle on peut replonger dans la contemplation et
la procrastination tabagique ! C’est dingue !
Je
suis allé faire des courses dans un supermarché et à la sortie un truc a sonné
dans mon sac, je me suis engueulé avec un vigile que j’ai menacé le type de le poursuivre s’il cherchait
une seconde à me retenir parce que je refusais d’ouvrir mon sac, n’ayant rien
volé, pour une fois ! Le mec devant
ma détermination a battu en brèche après m’avoir apostrophé de termes incongrus
– vous voulez me défier ? Je
ne lui ai pas répondu.
Enervé, je suis reparti en vélo. Le vélo est resté zen, mais pas moi ! Envie de fumer ! Je me
souviens, autrefois, quand j’en chiais
pour arrêter de fumer, je notais dans un petit carnet : EDF, Envie-De-Fumer.
Mais au bout de deux heures et après dix
EDF, je recommençais illico presto. Depuis j’ai une combine pour arrêter
en vingt-quatre heures, la martingale ! Bingo ! Donc j’étais énervé.
Allez, il me faut un petit plaisir pour faire passer ce mauvais moment
avec le pauvre vigile qui ne faisait après tout que son boulot, me dis-je. Et
pour ne plus penser à fumer. Un petit plaisir ? Alors là il faut que je
raconte une histoire dans l’histoire…
Il y a quelques semaines je suis allé faire mon linge à la
laverie automatique en bas de chez moi. Trois machines. Je mets les ronds dans
la fente et pas une ne démarre. Je téléphone au responsable de la laverie, il m’explique
qu’il faut que je recommence tout à zéro, remettre des ronds, je me suis trompé
dans les procédures compliquées de l’automatisation, il me rembourse ce soir les
trois machines qui n’ont pas fonctionné. Gentil honnête le gars. Il ne m’a toujours pas remboursé. Trois semaines
plus tard, je le lui fais remarquer. Il me traite de con et m’envoie sur les
roses et pas des trémières. Je décide de me venger. Ma vengeance sera terrible !
Quelques violentes idées vengeresses me passent par la tête mais une géniale me
vient à l’esprit ! Diabolique ! Et facile d’exécution !
A
ce stade, je dois remarquer qu’une vengeance n’est pas une chose simple. La
tentation est trop grande de se découvrir pour voir la gueule du type qu’on
souhaite ardemment punir. Mais se découvrir, c’est être pris la main dans le
sac en train de commettre une action nuisible. Alors il faut prendre sur soi le
fait de rester dans l’ombre et jouir en silence du mauvais tour qu’on inflige. Il
faut avoir de l’imagination. On doit se passer de contempler la déconfiture de la
victime. On ne peut pas se venger et en plus avoir l’argent du beurre ! C'est frustrant mais c'est la loi !
Nuitamment, déguisé et ganté, je suis allé coller sur la vitrine de la
laverie deux affichettes où j’avais inscrit en rouge :
ATTENTION !
LES MACHINES SONT EN PANNE !
LA DIRECTION.
Ce matin, trois jours après l’exécution
de ma vengeance, les affiches étaient toujours en place ! Inespéré ! Trois jours où
personne n’a foutu les pieds dans la laverie, trois jours sans recettes, trois
jours de manque à gagner pour le gars ! Ma vengeance est largement accomplie.
Il ne me manque que d’avoir vu la gueule
du type devant les affichettes. Je ne la verrai pas, c’est le paradoxe et la
rançon de la vengeance. La jouissance reste toujours incomplète. Tiens, il
faudra que j’en parle chez le psychanalyste… Quel ne fut pas mon plaisir en
passant en vélo ce soir devant la laverie : les affichettes étaient
toujours là et la laverie étrangement désertée ! J’espère que le patron de la laverie n’est pas
illettré, autrement ça risque de lui coûter plus cher que je ne le souhaite.
Normalement, ce petit plaisir aurait dû me consoler de mes ennuis au
super marché et nuire à mon envie de
fumer. Et bien non. C’est archaïque cette envie, il n’y a pas à redire ! Freud
avait raison ! J’ai tourné en rond deux heures chez moi en pensant j’y
vais ou j’y vais pas et finalement je suis allé chemise battante chez le chinois
acheter un paquet de gauloises bleues !
Il ne me reste plus qu’à arrêter de fumer.
Heureusement vingt-quatre heures suffisent. Elles sont programmées pour ce
week-end.
Pour ce qui concerne l’encadrement des photos,
je pense aujourd’hui avoir résolu le
problème : pas d’encadrement. De toute façon, je déteste les exergues, les cartouches et tutti quanti ! Parce que des photos qui nécessitent
l’encadrement comme faire valoir, ne valent pas en soi. D’un autre coté, il me faudrait tirer
les photos sur un plus grand format pour qu'on les voit bien en public. Et ça coûte plus cher !
Autrement on dira que je ne tire que des petits formats !
Et quand à celles plus
fragiles qui nécessitent une protection, on les mettra sous un verre, tout
simplement !
A bientôt !
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